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Argumentaire détaillé

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L'espéranto
comme langue auxiliaire internationale

Annexe 4

Mémoire

adressé à la Société des Nations par la Conférence internationale
sur l'enseignement de l'Espéranto dans les écoles, réunie au
Secrétariat de la Société des Nations du 18 au 20 avril 1922.

     Nous, éducateurs, délégués d'autorités scolaires et d'associations pédagogiques de 28 pays et représentants officiels de 16 gouvernements, assemblés au Secrétariat de la Société des Nations, affirmons notre conviction que l'état déplorable où en est arrivé le monde civilisé est dû, pour une grande part, à l'incompréhension et à la méfiance qui séparent les peuples.

     Nous affirmons notre conviction que les seuls remèdes certains à ce mal sont avant tout l'éducation et le principe de rapprochement international qui est à la base de la Société des Nations.

     Nous considérons comme l'une des contributions les plus efficaces à la solution du problème de la reconstruction du monde la langue auxiliaire internationale Espéranto, et nous estimons qu'elle devrait figurer au programme des écoles de tout pays civilisé.

     Nous tenons à faire part à la Société des Nations des résultats que nous avons obtenus en enseignant l'Espéranto dans des écoles publiques de différentes parties du monde.

     Nous avons constaté que l'Espéranto remplit les conditions requises d'une langue internationale pour répondre aux besoins pratiques de la parole et de l'écriture et qu'il possède en plus des qualités remarquables qui en font un instrument d'éducation de grande valeur.

     Loin de porter atteinte aux langues nationales, son étude aide au contraire les enfants à écrire et à parler plus correctement leur langue maternelle. On s'en aperçoit à une meilleure prononciation, à une élocution plus claire, à un choix de mots plus judicieux, à une connaissance plus sûre de leur sens exact, à un progrès en orthographe et en analyse grammaticale.

     Elle constitue une introduction à l'étude des autres langues, étrangères ou classiques, car elle facilite la tâche du professeur et lui fait gagner du temps en expliquant les formes grammaticales, en fournissant des racines de mots familières et en aidant l'effort d'expression chez des cerveaux ainsi habitués à manier une seconde langue.

     À notre avis, les enfants devront apprendre l'Espéranto à l'école primaire comme première langue étrangère. Ainsi, les élèves qui ne peuvent pas continuer leurs études seront au moins en possession d'une seconde langue qui pourra leur rendre des services pratiques. Quant à ceux qui ont les moyens de passer aux écoles secondaires, cette étude aura permis de connaître leur capacité pour les langues : ceux qui en ont pourront aller de l'avant avec l'esprit mieux préparé, ceux qui n'en ont pas pourront entrer dans d'autres sections, plus en rapport avec leurs aptitudes. On aura gagné du temps dans les deux cas.
Nous avons constaté aussi que l'étude et surtout l'emploi de l'Espéranto ont développé chez nos élèves la connaissance et le goût de la géographie et de l'histoire de la civilisation en éveillant leur intérêt pour les peuples étrangers, pour leurs mœurs, pour leurs arts, pour leur littérature et aussi pour l'idée de paix entre les peuples et de la Société des Nations. Cette influence morale est due à l'échange de lettres, de cartes postales, de dessins ou de timbres avec des enfants d'autres nations et aussi à la lecture de revues ou de livres publiés en Espéranto dans différents pays. L'avantage est que les élèves peuvent se mettre à correspondre au bout de quelques mois d'étude et qu'ils n'ont pas besoin de se limiter à un seul pays. Il nous est souvent arrivé d'avoir des élèves d'une seule classe qui correspondaient avec toutes les parties du monde.

     Avec deux leçons par semaine, un élève peut acquérir une connaissance suffisante de la langue en un an, ce qui est impossible en trois ans pour une autre langue.

     Nous soumettons ce Mémoire à votre bienveillante attention et nous vous recommandons vivement d'encourager l'enseignement de l'Espéranto dans les écoles, non seulement en raison de son utilité pour le commerce, la science et d'autres branches de l'activité internationale, mais aussi en raison de son importance pour le développement des relations amicales entre les peuples, ce qui est le véritable objet de la Société des Nations.


VŒU PROPOSÉ À LA SOCIÉTÉ DES NATIONS
PAR LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE
SUR L'ENSEIGNEMENT DE L'ESPERANTO DANS LES ÉCOLES.

     La Conférence Internationale sur l'enseignement de l'Espéranto dans les écoles, réunie au Secrétariat de la Société des Nations, du 18 au 20 avril 1922, après avoir examiné les expériences faites et les résultats acquis dans ce domaine, soumet à la bienveillante considération de la Société des Nations le vœu suivant, qui répondrait au désir des autorités scolaires représentées à la Conférence :

     « Vu les difficultés linguistiques qui entravent les relations directes entre les peuples et la nécessité urgente d'y porter remède pour faciliter la bonne entente entre les nations ;

     « Vu la diffusion et le développement déjà considérables de l'Espéranto et les résultats intéressants obtenus par l'enseignement de cette langue auxiliaire dans les écoles publiques de plusieurs États, où sa valeur pédagogique a été reconnue :

     « La Société des Nations exprime le vœu que cet enseignement soit généralisé dans les écoles publiques du monde entier à titre de moyen pratique et populaire d'échange international, nullement destiné à porter atteinte au prestige séculaire des langues nationales de culture.

     « La Société des Nations invite ses Membres à lui communiquer les mesures qu'ils décideront de prendre à ce sujet, soit dans leur législation, soit par décrets administratifs, afin que le Secrétariat général puisse les renseigner à leur tour sur le caractère de réciprocité et d'universalité de ces mesures. »

     

ACCORD SCOLAIRE INTERNATIONAL SUR L'ENSEIGNEMENT
DE L'ESPÉRANTO, PROPOSÉ PAR LA CONFÉRENCE DE GENÈVE.

     « Les États signataires reconnaissent l'importance de répandre l'usage universel d'une langue auxiliaire pratique pour faciliter les communications internationales, s'engageant à introduire graduellement dans leurs écoles publiques l'enseignement de l'Espéranto et à informer la Société des Nations des mesures qu'ils décideront de prendre à ce sujet, soit par disposition législative, soit par décret administratif.

     « Le présent accord ne deviendra applicable que lorsqu'il y aura dix États signataires, dont au moins cinq en Europe. »